Jean de Biaudos

1er marquis de Castéja

 

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Jean, 1er marquis de Castéja, baron de Mézos et de Laharie, dans les Landes, et de Tréveray, Demange-aux-Eaux et Saint-Joire en Lorraine, seigneur de plusieurs lieux, brigadier des armées du Roi, commandeur des ordres de Saint-Louis et de Saint Lazare,  né à Castéja, fut baptisé en l’église de Mézos le 20 mai 1634.

Auteur de la branche lorraine[1] de cette maison, il est entre autres intéressant pour avoir été le premier à s’être illustré à la Cour et permis à ses successeurs d’occuper depuis lors  nombre de charges importantes dans l’armée et la diplomatie.

On dit que c'est à Jean de Biaudos que le titre de marquis de Castéja échût pour avoir sauvé la vie de Louis XIV au siège de Landrecies. Ce même Jean qui fut fait commandeur de l'Ordre de Saint-Lazare, et à qui le roi donna un régiment d'infanterie de son nom (Castéja-infanterie). Il eût la jambe emportée par un boulet de canon à cette "occasion". Sa belle conduite lui valut les éloges de Turenne, qui ne les prodiguait pas. Louis XIV vint le trouver dans sa tente et lui donna des marques du plus "touchant intérêt". Le terme est fort à propos, car il s'agissait en l'occurrence d'espèces sonnantes et, osons le mot, trébuchantes, à savoir une rente sur l'abbaye de Saint-Sever de Rustan.

Il monta à Paris avec ses frères et son cousin, le maréchal de Gramont, comme beaucoup de gascons du moment. D'abord page de M. de Luxembourg, il débuta sa carrière dans les armées de Louis XIV.

Pendant la Fronde, il se distingua à la bataille du Faubourg Saint-Antoine, le 2 juillet 1652,  conduisant trois fois à la charge son régiment contre les troupes du Grand Condé, sous les yeux de Mazarin et du jeune Louis XIV, auquel il fut présenté à cette occasion. Sa belle conduite lui valut les éloges de Turenne qui ne les prodiguait pas. Il eut aussi droit à la visite de Mazarin qui lui demanda ce qu’il voulait. Sept mille livres de pension sur l’évêché de Dax répondit le jeune gascon. Cet évêché n’en valant pas quatre alors, le ministre lui accorda deux commanderies de l’Ordre de Saint-Lazare et quatre mille livres de pension qui le mirent à portée de suivre son avancement et de faire sa cour au monarque.

 

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Bataille du faubourg Saint-Antoine

 

Distingué  parmi les blessés du siège de Landrecies le 9 juillet 1655, où il eut la jambe emportée par un boulet de canon, il fut à nouveau présenté au Roi auquel il eut l’adresse de dire que sa Majesté avait échappé de justesse à ce coup qui était à portée d’elle.

Il obtint le 10 mars 1658 une compagnie de chevau-légers au régiment de Turenne-cavalerie où il  est capitaine lieutenant en 1664[2]. En 1667 il obtient une compagnie dans le régiment Colonel-Général de la cavalerie légère, le 13 août[3]. Il introduisit alors les uniformes dans les troupes, en donnant le premier à sa compagnie des manteaux tout bleus au lieu des divers coloris alors en usage, innovation qui plut à Louis XIV qui prescrivit alors les uniformes.

Il fut reçu chevalier de Saint-Louis en 1669 avec ses cousins Arnaud de Salha et Henri de Montauzé, par Charles Achille de Nerestang, Grand Maître des Ordres du Roi. Le Roi lui enverra le 8 mai 1693 le cordon de commandeur de cet ordre et daigna lui remettre en personne[4]. Il le traita toujours depuis avec bonté, lui accordant notamment une place à Saint-Cyr pour sa fille Françoise[5], qui avait passé l’âge d’admission à cette maison. En 1680, il avait acheté la terre de Treveray en Lorraine, baronnie qui resta jusqu’en 1820 chez les Biaudos.

Il fut nommé premier capitaine le 20 novembre 1675, et devint major de ce régiment de Turenne, puis maistre de camp de l’un des quatre-vingt régiments que le roi avait fait lever.

Le roi lui donna un régiment à son nom, qui fut un des plus beaux et le premier complet, parce qu’il n’en vendit pas les emplois comme bien d’autres, mais les donna à la simple condition de fournir un nombre de recrues proportionné au grade. Son fils aîné leva le régiment en 1703 et son cadet, Charles-Louis en sera major et lieutenant-colonel. L’uniforme du régiment était constitué d’un habit rouge, galonné de neuf lignes de trois couleurs (brun, jaune-orange et vert), fond noir, doublé de vert ; d’une veste et d’une culotte verte galonnés d’argent, ainsi que le chapeau.

 

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Drapeau du Castéja, infanterie

 

Bien considéré de Louis XIV, il fut nommé gouverneur de Toul le 16 février 1682, après avoir acheté en Barrois et en Champagne la baronnie de Treveray et les seigneuries de Saint-Joire, Rosières-en-Blois et Laneuville-aux-Forges

Il avait épousé le 4 novembre 1675 Marie Midot de Villers, fille d’un conseiller au Parlement de Metz, séparée d’un monsieur de Vieneulles sur allégation d’impuissance, ce qui n’a pas empêché une autre femme qu’il épousa ensuite, de lui donner plusieurs enfants. Marie de Midot mourut veuve et à un âge avancé, le 30 novembre 1727. Elle fut enterrée dans la chapelle de la Vierge de l’église de Tréveray.

Son époux l’avait en effet quitté neuf ans plus tôt : L'an 1718 l'onze février est décédé messire Jean de Biodos de Castéja, âgé d'environ 90 ans, vivant chevalier, baron de Treveuray, seigneur de Saint-Joire, La Neuville et autres lieux, chevalier de Notre-Dame de Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem, commandeur de l'ordre militaire de Saint-Louis, gouverneur de la ville de Toul et pays Toulois, après avoir été munis des sacrements de pénitence, du Saint Viatique et d'extrême onction, et son corps fut inhumé le 13 dudit mois dans l'église cathédrale de ladite ville en présence de monseigneur Blouët de Camilly, évêque comte de Toul, prince du Saint-Empire, conseiller du Roi en son conseil d'état, de messiers Louis La Vallée de Pimodan, conseiller chevalier au Parlement de Metz, Charles Maisontiers, colonel d'infanterie et Claude Joseph Geoffroy, commissaire des guerres ...

Il avait vécu, lui aussi, jusqu’à un âge avancé, conservant sa vivacité gasconne et un caractère si ferme qu’un jour, son fils aîné Jean-François, alors maréchal des camps, s’étant oublié jusqu’à lui tenir des propos irrespectueux à table devant plusieurs convives, il sauta sur sa béquille et le poursuivit en l’en frappant jusqu’au milieu de l’escalier, où le fils s’arrêta, et demandant pardon à son père, le ramena à table en lui réitérant ses excuses avec humilité et sentiment : apprends, lui dit son père, à ne jamais te laisser moquer impunément par tes enfants. Dans quelle position qu’ils se trouvent vis-à-vis de toi, rien ne peut effacer le caractère sacré de la magistrature paternelle, la première, la plus juste et la plus naturelle de toutes … N’oubliez pas, mes enfants, cette leçon un peu trop pratique et puisse t’elle ne se jamais renouveler dans votre vie.

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Armes de Jean de Biaudos, gouverneur de Toul (sur un livre poémier où chacun depuis lui jusqu'à André (le préfet), a écrit un poème quelque peu licencieux accompagné d'une gravure de même).

 

 

Outre Jean-François, il eut pour enfants :

·         Anne-Pierre, mariée au marquis de Prie, parrain de Louis XV ;

·         Charles-Louis, ambassadeur de Suède pendant onze ans, très estimé du roi Frédéric 1er et du roi de Pologne[6] ;

·         Françoise, admise à Saint-Cyr en 1696 ;

·         Jean Charles, filleul de son oncle maternel Jean de Bédorède dit Montolieu ;

·         Catherine, mariée à un Parthenay-Inval.

 

Il est mort le 11 février 1718 à Toul [7] :

L'an 1718 l'onze février est décédé messire Jean de Biodos de Castéja, âgé d'environ 90 ans, vivant chevalier, baron de Treveuray, seigneur de Saint-Joire, La Neuville et autres lieux, chevalier de Notre-Dame de Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem, commandeur de l'ordre militaire de Saint-Louis, gouverneur de la ville de Toul et pays Toulois, après avoir été munis des sacrements de pénitence, du Saint Viatique et d'extrême onction, et son corps fut inhumé le 13 dudit mois dans l'église cathédrale de la dite ville en présence de monseigneur Blouët de Camilly, évêque comte de Toul, prince du Saint-Empire, conseiller du Roi en son conseil d'état, de messiers Louis La Vallée de Pimodan, conseiller chevalier au Parlement de Metz, Charles Maisontiers, colonel d'infanterie et Claude Joseph Geoffroy, commissaire des guerres ...

Jean de Biaudos eut de somptueuses funérailles en l’église de Toul, comme le rapporte ce récit [8] : M. de Castéja, gouverneur de cette ville, étant décédé du jour d'hier, M. le chevalier de Pimodan, son neveu, vint de la part de madame et de mademoiselle de Castéja chez M. Bonnet, président en exercice, le prier d'assembler Messieurs pour leur demander de vouloir bien inhumer dans leur église cathédrale le corps dudit sieur de Castéja, ce que mesdits sieurs aujourd'hui assemblez en chapitre, iceluy intimé au son de la cloche, leur ont accordé et ordonné que l'on sonneroit comme pour un chanoine mort et que son corps serait exposé comme pour un chanoine presbytra.

Et le lendemain dimanche 13 du présent mois, Messieurs assemblez au chœur à cinq heures du soir furent en corps avec la croix au gouvernement lever le corps dudit défunt et le conduisirent dans ladite église, accompagnez de tous les corps séculiers et réguliers tant de la ville que des faubourgs, sans faire aucune station, pas même dans sa paroisse, suivant l'usage ordinaire, et étant entrez dans l'église cathédrale, le corps fut exposé au chœur en la place susdite et, après les obsèques chantées par deux archidiacres, on fut inhumer le corps dans le collatéral droit, devant l’autel de la Conception.

Et le mardy suivant 15 du même mois, on chanta les vigiles à trois nocturnes, avec la représentation au milieu du chœur et les trois dernières leçons furent chantées par un archidiacre, Monsieur le Doyen et Monsieur l'Evêque.

Et le lendemain 16ème jour du service, Monsieur l'Evéque célébra la messe ponti­ficalement, où les corps séculiers et réguliers de la ville assistèrent et, après la messe célébrée comme dit est, les obsèques furent chantées par deux archidiacres, et les encensements à l'entour de la représentation furent faits par le prieur de Saint-Léon, M. le Chantre et M. le Doyen.

 

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[1] C’est grâce à lui que les Biaudos s’implantèrent en Lorraine, et des liens étroits allèrent bientôt se tisser avec le roi de Pologne à la Cour de Lunéville. Ainsi gascons depuis 1216, les Biaudos devinrent lorrains en 1680.

[2] Baptême de son cousin Jean-François, dont il est parrain, fils de son oncle Montolieu (de son nom : Bédorède) qui est premier capitaine de ce même régiment.

[3] Major au régiment du Colonel Général en 1667, capitaine en 1668 et 1669, capitaine réformé entretenu à la suite du régiment de Cavalerie Colonel dans la compagnie de Dauger, il en était premier capitaine lors de son mariage en 1675 (BNF, cabinet de titres, pièce originale 612, (de Castéja, dossier 14991, pièces 3,4 et 5 - ref communiquée dans un Bulletin de la Société de Borda)

[4] Jean, qui se distingua glorieusement aux combats de Senef, de Turkheim et au siège de Mons, fut nommé par Louis XIV commandeur de l'Ordre de Saint-Louis, avec 3000 livres de pension

[5] Jeanne-Françoise, fille de Fiacre de Biaudos, frère cadet de Jean,  était entrée à Saint-Cyr en 1686 et avait les faveurs de Madame de Maintenon. Elle ne fut sûrement pas sans influence sur la décision du roi qui mena  à l’entrée de sa cousine reçue le 8 mai 1696.

[6] Il fut le parrain de son fils et le tint sur les fonts baptismaux.

[7] Jeudi 10 février 1718 - Castéja, gouverneur de Toul, est mort : il avait quatre-vingt-huit ans, et il y en a plus de soixante qu'il avait une jambe de bois. Il était cordon rouge de l'ordre de Saint-Louis. Il y a un petit brevet de retenue sur son gouvernement qui ne vaut au plus que 6000 livres de rente, et l'on croit que son fils aîné, qui est colonel d'infanterie, pourra bien avoir ce gouvernement. (Journal du marquis Dangeau)

[8] Archives de Meurthe-et-Moselle, 0.89 (ou G.89), folio 113, église de Toul